mercredi 1 février 2012

Scène de la vie en bibliothèque

Qui dit semestrialisation au premier semestre dit retour du thésard en bibliothèque au début de février. Comprenons-nous bien : retour du thésard à (plus ou moins) plein temps ; évidemment que j'ai pu y passer ce semestre, sinon je me demande ce que ce sera si j'ai la veine démentielle de décrocher un poste plus ou moins pérenne à la fac lorsque ma bourse de thèse sera finie.

L'animal retrouva donc son milieu (presque) naturel en début d'après-midi et huma l'Odeur Chérie de la salle 2, embrassant du regard les très nombreux rayons, la mezzanine, les marches piégées de l'escalier du milieu (si vous posez le pied trop vers le bord, elles s'inclinent pour accélérer notablement votre chute descente) et les néons lunatiques au milieu des rayonnages (je marche, je marche pas, je marche, je marche pas, non cette fois-ci tu m'as définitivement vexé, va chier). Quelque chose, pourtant, lui semblait changé, quelque chose de subtile, d'imperceptible... 

La thésarde alla chercher ses revues, bénit trois fois Minerve et Mercure de lui avoir réservé le dictionnaire d'allemand pas en caractères gothiques et s'assit religieusement à sa table. Il lui fallut une dizaine de minutes de plus pour se rendre compte de ce qui se passait : contrairement à d'habitude, ses mains n'étaient pas (tout à fait) congelées. Ô joie délirante ! Déferlement d'allégresse ! La bibliothèque a enfin décidé de mettre le chauffage (ou de le hausser ; ou de le réparer ; rayez la mention inutile) ! 

(Il semblerait par contre que cette Indulgence Plénière n'ait pas été étendue à la salle 3, ce qui est fort dommage, car c'est la salle d'histoire ancienne, donc j'y passe aussi une bonne partie de mon Temps ; ceci dit, avoir un Postérieur seulement à moitié congelé est déjà en soi un progrès.)

Radiateur en fonte

Je sais, je sais, vous êtes incrédules. Prenez deux minutes pour vous remettre de vos émotions et lisez la suite.

Car ce nouvel Etat de Choses a aussi ses inconvénients. Environ une demi-heure après, un bruit étrange commença à se faire entendre, assez discrètement tout d'abord : « Zzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzz... » Notre étudiante leva la tête, mais le bruit cessa aussitôt, ce qui rendit son origine presque impossible à identifier.

Dix minutes plus tard, rebelote, un peu plus fort, cette fois : « Zzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzz... » Nouvelle levée de tête, nouvel arrêt du bruit. L'étudiante contempla, cette fois, un peu plus attentivement ses voisins. Celui installé quelques tables plus loin la regarda d'un air de dire "Hé ! ce n'est pas moi !!!" Bon, retour à ce délicieux article en allemand.

Mais le Bruit revint à la charge : « ZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZ... » 

Cette fois-ci, plus aucun doute : la "chaleur" (et le déjeuner point trop loin) aidant, le gentil vieux monsieur assis devant un ordinateur pour consulter le catalogue s'était tout simplement... endormi, le corps avachi contre le dos de son siège, la tête sur la poitrine. Et c'était tout naturellement qu'il s'était mis à ronfler comme un bienheureux. Au bout de quelques secondes, à peu près tous ceux qui étaient à moins de dix mètres de lui le fixaient, yeux écarquillés ou sourcils froncés.

Environ cinq minutes plus tard, il se réveilla, reprit sa recherche exactement où elle s'était arrêtée. En sortant, il nous fit à tous un grand sourire d'incompréhension, de type "Je ne sais pas exactement pourquoi vous me regardez : j'ai un bout de salade coincé entre les dents ?"

Je me demande si, en fait, la (très) basse température n'était pas pour autre chose que nous "conserver".

3 commentaires:

  1. Je lis ce billet en espérant un article sympa sur la vie des doctorants, et je trouve une allusion pas sympa du tout à un "gentil vieux monsieur"...
    Pas très cool 1/ de se moquer des autres 2/ dans leur dos 3/parce qu'ils sont vieux.
    Bof bof ton attitude je trouve, même si tu veux faire une blague sur le fait qu'il fait froid en bibliothèque, etc.

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  2. Franchement, le but n'était pas de brocarder les chercheurs septuagénaires, d'autant que quiconque fréquente un tout petit peu les bibliothèques de recherche sait que c'est quelque chose d'assez fréquent, pour peu que la température soit acceptable et le déjeuner point trop loin, et que cela touche tout le monde, quel que soit l'âge.

    Le plus amusant, à mon avis, était que la personne en question n'est mise à ronfler pendant 10-15 minutes, puis s'est réveillée et a repris ce qu'elle était en train de faire sans se rendre compte de rien.

    C'est bien d'être critique et de m'alerter sur un éventuel "conflit des générations", qui n'a pas lieu d'être et, je l'espère, n'est pas présent sur ce blog, mais il est intéressant aussi de se détendre, parfois, et de ne pas systématiquement voir le mal partout...

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  3. D'accord, me voilà rassurée. Merci pour ta réponse.

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